samedi 19 avril 2014

La jouissance


L'histoire commence là où toutes les histoires devraient finir : dans un lit. Nicolas vit depuis deux ans avec Pauline, ce n'est donc pas la première fois qu'ils se retrouvent l'un en face de l'autre... Ce jour-là, pourtant, quelque chose d'inédit se produit.






Rien d'étonnant à ce sous-titre, "Un roman européen" : Florian Zeller y analyse parallèlement la relation amoureuse de Nicolas et Pauline et celle, politique cette fois, entre les pays qui ont construit l'Union européenne, à commencer par la France et l'Allemagne. Si Nicolas, 30 ans, est un jouisseur, son enthousiasme permanent "ne serait-il pas un beau masque derrière lequel il cache sa vraie nature" ? s'interroge Pauline. A 28 ans, celle-ci se situe plutôt dans la catégorie des angoissées, travaille dans une grande entreprise de cosmétique, a déjà trois personnes sous ses ordres et semble promise à un brillant avenir. Son compagnon, en revanche, est en mal de reconnaissance : cinéphile passionné, féru de Bergman et de Godard, il rêvait de devenir réalisateur et doit se contenter de tâches subalternes sur les plateaux de tournage, tout en s'échinant à écrire un scénario. Pauline et Nicolas s'aiment, se disputent, voyagent, vont au cinéma. Perfect Day de Lou Reed est l'hymne national de leur couple. "Mais les couples, comme les pays, ne sont pas éternels." Et au bout de deux ans, Nicolas s'interroge sur son désir pour Sofia, une jeune et jolie Polonaise hédoniste, qui veut seulement "jouir et faire jouir". Justement, la jouissance n'est-elle pas devenue le maître mot d'une génération "qui est complètement passée à côté de l'Histoire : pas de victoire, pas de bourreau, pas de sang" ? Juste la chute du mur de Berlin et les attentats du 11 Septembre... D'une plume sobre, Florian Zeller brosse un portrait sans concession de cette génération qui est entrée "individuellement" dans un nouveau siècle, par la grâce des nouvelles technologies. Convoquant aussi bien André Breton, Milan Kundera, Michel Leiris ou Beethoven que Lénine, François Mitterrand et Helmut Kohl, le romancier signe là son meilleur livre.
L'express

Le titre est kundérien, et le projet romanesque ne l'est pas moins : dans La Jouissance. Un roman européen, Florian Zeller raconte en parallèle l'histoire d'un couple (amour, délitement, rupture) et celle de la construction européenne (enthousiasme, ennui, désaffection). Nicolas et Pauline, trentenaires, sont les représentants d'une génération « passée au travers des filets de l'Histoire », pour laquelle l'aspiration à la jouissance individuelle a remplacé l'idéal collectif. Quant à l'Europe, elle aurait pu être cet idéal, sauf qu'elle n'intéresse plus personne... L'ambition de Zeller est séduisante. Mais il n'en fait rien, si ce n'est tirer deux fils narratifs. Reste un roman banal et vaguement prétentieux, astucieux autant que superficiel.
Telerama

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